CH 2002 88'
Réalisation: Jacqueline Veuve
Scénario: Jacqueline Veuve, Lionel Baier
Image: Hugues Ryffel
Son: Luc Yersin, Fred Kohler
Montage: Edwige Ochsenbein
Musique:: Christine Chauve
Production: Ciné Manufacture CMS SA
En souvenir du marché de mon enfance à Payerne, j'ai réalisé un film sur celui de Vevey. Pendant un an, j'ai suivi quotidiennement le travail et les loisirs d'une «pêcheuse»; d'un champignonneur italien décédé pendant le tournage; d'un maraîcher qui a tout misé sur la culture biologique, respectueuse de l'environnement; d'un couple d'horticulteurs; d'une vieille paysanne de 91 ans, présente sur la place du marché tous les samedis de l'année avec son fils de 61 ans; d'une marchande de volaille; d'une Camerounaise qui écoule les fruits de son village natal et d'une famille d'agriculteurs maraîchers qui proposent sur leur banc aussi bien des confitures, de la laitue que de la viande de veau issues de leurs exploitations. Parmi eux plusieurs Suisses allemands bien intégrés.
Tous vendent ici le produit de leur effort et de leur passion mis à rude épreuve par les lois du commerce planétaire.
Jacqueline Veuve
Hermann Bühlmann: «Ça m'embête le marché, ça m'embête. Les femmes vont boire le café et puis c'est moi qui dois faire le marché. Elles sont toujours au bistrot, ma femme et compagnie. C'est embêtant quand il faut attendre les clients. Des fois faut attendre longtemps pi tout d'un coup. y en a un tas qui sont en même temps pi après y a plus personne.»
Marianne Bühlmann: «Il faut reconnaître que les grandes surfaces nous scient, ils cassent les prix. Ils font des actions pi nous ben on fait avec ce qu'il reste. Il est arrivé un moment où on na plus eu les forces nécessaires pour faire toutes les cultures alors nous avons vendu pour un locatif et puis ces messieurs voulaient acheter toute la parcelle. Alors nous avons refusé parce que leur intention était de nous mettre en punition au sommet de leur maison, de rester à regarder passer les trains et les voitures, sans activité, c'est mortel pour des gens qui ont travaillé la terre toute leur vie.»
Un JOUR DE MARCHE ouvert au monde
par Pascal Gavillet, Films''
Qu'elle filme des paysans en Gruyère en train de faire du fromage, les vicissitudes quotidiennes de l'Armée du Salut, les vignerons ou la pérennité du marché aux fleurs, fruits, viandes, poissons et légumes de Vevey, Jacqueline Veuve est toujours aussi inspirée. Mais son talent de documentariste n'est pas seulement affaire de captation du réel, de moments arrachés au temps ou de témoignages plus ou moins pertinents. Il réside dans un vrai travail d'écriture qui s'exprime une fois de plus à plein dans sa nouvelle réalisation, Jour de marché, dont le titre fait bien sûr indirectement penser au Jour de fête de Tati, qui lui aussi tournait (plus ou moins) autour d'un lieu unique. Dans son film, Jacqueline Veuve se centre en effet sur la place de Vevey où se tient chaque mardi et samedi le marché. Ce qui ne signifie pas que sa caméra y demeure, mais que toutes les séquences se rattachent au lieu central et rassembleur où finissent ici par converger chalands et marchands, soit les héros de ce métrage aussi passionnant que drôle.