Un petit coin de paradis
CH 2008 80'
Réalisation: Jacqueline Veuve
Scénario: Jacqueline Veuve, Antoine Jaccoud
Image: Peter Guyer, Florian Burion
Son: Luc Yersin
Montage: Loredana Cristelli
Production: P.S. Productions Sàrl
Pass:Un petit coin de paradis (F)
540p Français ST -
Pass:Un petit coin de paradis (E)
540p Français ST English
Pass:Un petit coin de paradis (D)
540p Français ST Deutsch
A Ossona, un hameau abandonné du Valais central, trois générations se rencontrent pour prendre part à un projet de réhabilitation qui fera de ce lieu fantôme un éco-village modèle, un nouveau paysage où agriculture, nature et tourisme tenteront une cohabitation harmonieuse. Il s'agit là d'un exemple de développement durable concret et particulièrement significatif. Que peuvent partager ces représentants des Anciens et des Modernes? Qu'ont-ils à se dire? Qu'ont-ils à se transmettre? Et si cette valorisation du patrimoine enchante les défenseurs et responsables du projet ainsi que les «natif».
Histoires du monde paysan de montagne
Hebdo
Elle a filmé mieux que quiconque le monde paysan et les métiers en voie de disparition. Un petit coin de paradis approfondit ces thèmes et transmet un savoir oublié à la jeunesse. Jacqueline Veuve a suivi pendant deux ans les travaux transformant Ossona, hameau abandonné du Val d'Hérens, en site agro-touristique. Agés entre 75 et 91 ans, les anciens habitants se souviennent, témoignent et dialoguent avec six adolescents en difficulté qu'on emploie à la reconstruction du village désaffecté.
Six à sept décennies séparent les vieux des jeunes. Un gouffre temporel. Le Valaisans chenus ont connu une vie difficile. Il fallait travailler dur pour manger, brasser la neige pendant une heure pour aller à l'école. Mais «On n'était pas malheureux, on se contentait de ce qu'on avait». A défaut de prospérité, les montagnards avaient la beauté, le calme, le silence, le contact avec la nature sauvage et grandiose, des liens sociaux forts. En face d'eux, les gosses à la dérive n'ont pas de repères. Ils viennent de Haïti, du Maroc, on sent les déracinements, les drames familiaux. Au contact de la nature, ces gosses des villes apprennent à ouvrir les yeux, à observer les manifestations foisonnantes de la vie et les insectes bizarres. En travaillant le bois, en plantant des arbres, ils s'inscrivent à nouveau dans une histoire millénaire. Ils renaissent à la vie, comme les chalets qu'ils réparent.
Les aînés leur parlent d'une époque inconcevable où l'on pouvait laisser sa porte ouverte, où les tomates, les spaghetti et les frites étaient inconnus, où les hommes travaillaient au barrage onze heures par jour, sept jours par semaine avec une heure de libre le dimanche matin pour la messe ou la lessive, où en guise de Nintendo les gosses n'avaient qu'une grossière boule taillée dans le bois à la main pour jouer aux quilles dans leurs rares instants de loisirs. En ce temps, on ne rentrait jamais à la maison s'en ramener quelque chose: du bois pour le feu, des baies, des simples le plantain, c'est «une plante miraculeuse, de l'or dans la nature» explique une dame. Il guérit des piqûres d'orties ou de guêpes. Il leur explique le principe du «guitchou» une meurtrière dans le mur du chalet pour tirer le renard depuis son lit. Ils présentent des objets d'autrefois: l'attrape-marmotte, une pique meurtrière pour harponner les pauvres bêtes dans leurs terriers, l'espèce de double spatule servant à corriger la croissance des cornes chez les futures reines, la baguette dont l'instituteur se servait pour faire de la pédagogie. Les enfants n'étaient pas des petits princes, en ce temps, mais des forces vives. On ne leur n'épargnait pas les coups de pieds au cul, on les terrifiait avec des histoires folkloriques pleines de fantômes
Deux kids écoutent du rap sur leur ghetto blaster et dansent tandis que deux vieux s'éloignent parmi les plantes foisonnantes. Deux générations se croisent, et c'est ainsi depuis la nuit des temps. Mais le temps va toujours plus vite et le gouffre s'accroît. Le temps d'un film, Jacqueline Veuve prend le temps d'écouter les récits venus de loin et de faire un bout de chemins avec ceux qui les raconteront plus tard. Un petit coin de paradis nous ravit comme un conte de fées et avive la mélancolie des choses qui ne sont plus.