Réaction du cinéaste Fernand Melgar suite à l'arrestation de Fahad K.

24.3.2009

La forteresse

"L'Office fédéral des migrations (ODM) nous a tendu un piège, il a monté un véritable guet-apens! s'est insurgé Fernand Melgar suite à l'arrestation de son ami Fahad K., protagoniste de son film LA FORTERESSE. "Un haut fonctionnaire de l'ODM, présent lors de notre rencontre avec la Conseillère fédérale Widmer-Schlumpf, m'a appelé le vendredi 20 mars pour m'informer de l'attribution de Fahad K. au canton de Zurich. Il connaissait certainement la décision négative rendue par le Tribunal administratif fédéral (TAF) en date du jeudi 19, mais s'est bien gardé de nous en informer, ce que nous jugeons scandaleux. Je rappelle qu'il s'agit tout de même, derrière ces procédés honteux, du sort d'un homme qui risque la mort et mérite notre protection car il correspond aux critères de l'asile." commente Elise Shubs, sa mandataire juridique auprès du au Service d'Aide Juridique aux Exilé-e-s (SAJE) à Lausanne.
Afin de collaborer au bon déroulement de sa procédure, Fahad K. s'est rendu confiant lundi au bureau cantonal zurichois de l'Office des migrations accompagné d'une bénévole d'Amnesty International. "La décision négative du Tribunal administratif fédéral nous est parvenue par fax au moment de son arrestation le lundi après-midi. On nous avait encore jamais fait ce coup-là! remarque Elise Shubs. En tant normal, le cette genre de décision nous est transmise par le TAF le jour même, jamais quatre jours après."
"Il s'est jeté dans la gueule du loup et nous nous en voulons amèrement ! Je m'en veux d'avoir été berné alors que j'ai fait fait confiance à la loi et à ses représentants. Comment peut-on agir de la sorte, piéger Fahad comme un criminel ? constate Fernand Melgar. Comme il était inquiet de retourner à Zurich, pour le rassurer, je lui avais acheté un billet aller-retour et je lui ai dit qu'une personne d'Amnesty l'accompagnerai dans ses démarches administratives. Dimanche dernier, nous avons fait une promenade en montagne et je lui ai parlé de la tradition humanitaire de notre pays. Très préoccupé pour son avenir, je lui ai répété qu'il devait faire confiance à la justice de notre pays et au bon sens de nos autorités. Je regrette aujourd'hui amèrement ces paroles. La Suisse a failli dans sa souveraineté en matière d'asile pour se plier à une politique à la Ponce Pilate des accords de Dublin. Cette décision trahit l'esprit qui a permis aux Conventions de Genève de voir le jour en Suisse et d'en être les dépositaires."
Fahad K. est aujourd'hui enfermé à la prison de la police cantonale de Zurich dans l'attente de son renvoi imminent. Elise Shubs s'inquiète: "Fahad K. est un jeune homme de 24ans au bout du rouleau. Il est dépressif et à l'heure qu'il est, il doit être dans un état désespéré. Il est à l'isolement et lors de son dernier séjour dans la même prison, fiévreux et souffrant de forts maux de dos, il a demandé à huit reprises à pouvoir voir un médecin et parler à sa mandataire juridique, mais les policiers ne lui ont pas même pas répondu. Je crains sérieusement pour sa santé mentale et qu'il ne finisse par attenter à sa propre vie. Nous avons demandé à la Croix Rouge de le voir de toute urgence."
Le 11 mars dernier, sous l'impulsion de Carlo Sommaruga (GE/PS), des conseillers nationaux appartenant à différents partis politiques de gauche comme de droite, Francine John Calame (NE/Verts), Jacques Neyrinck (VD/PDC) et Claude Ruey (VD/PLR) avaient été reçus par la Conseillère fédérale Eveline Widmer-Schlumpf pour parler des problèmes engendrés par l'application depuis le 12 décembre 2008 en Suisse des accords de Dublin II et trouver une solution pour Fahad K.
La Conseillère avait ensuite invité le vendredi 13 mars Fernand Melgar et Elise Shubs pour un entretien personnel. Amère, Fernand Melgar conclut "Préoccupée par le sort du jeune Irakien, Mme Widmer-Schlumpf nous avait assuré qu'il fallait faire confiance à la justice de notre pays. Je me sens aujourd'hui profondément trahi. Chaque semaine, la mère de Fahad , qui n'ose plus sortir de sa maison à Bagdad et qui continue à recevoir des menaces de mort pour son fils, me téléphone inquiète pour prendre des nouvelles. Je l'ai toujours rassurée, lui disant qu'il était en sécurité dans mon pays, la Suisse. Que vais-je lui dire à son prochain appel?"

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